Médias et divertissement : de la personnalisation à la co-création
Coincés à domicile, parfois entre télétravail et devoirs des enfants, les Français confinés ont dû adapter leur façon de se divertir. Toute la chaîne de valeur du secteur des médias et du divertissement a été impactée, des plateformes qui semblent gagnantes, aux chaînes de télévision qui souffrent du manque d’investissement publicitaire, sans oublier la presse écrite ou les cinémas qui retrouvent à peine leur audience. Les nouvelles habitudes médias vont-elles perdurer ? Comment le numérique peut-il accompagner les acteurs des médias dans cette nouvelle donne ?
Une fenêtre sur l’extérieur
Dès la mi-mars, les lieux de divertissement habituels étant fermés, le divertissement à domicile est devenu le seul ressort. Les chaînes de télévision ont dû bousculer leur programmation, à la fois impactées par l’arrêt des compétitions sportives et des tournages, mais aussi par un appétit des téléspectateurs pour les contenus nostalgiques (La Grande Vadrouille et autres) ou pédagogiques (La Maison Lumni et Educ’Arte).
En parallèle, Netflix a acquis près de 16 millions de nouveaux abonnés au cours du premier trimestre 2020, dépassant de loin ses propres objectifs, et a également vu son audience quotidienne monter en flèche, ce qui l’a obligé à dégrader la qualité du signal pour préserver la bande passante européenne. Disney+ a été sommé de retarder son lancement de deux semaines pour la même raison.
En l’absence de sport, c’est le marché des jeux vidéo qui a explosé (mention spéciale à Animal Crossing), inspirant des initiatives intéressantes comme celle des 24h du Mans virtuelles. Enfin, face à la fermeture des lieux de spectacles, ce sont les réseaux sociaux qui ont pris le relais, notamment Facebook (et Instagram du même groupe) via l’initiative #ensembleàlamaison et les nombreux concerts ou représentations en direct des artistes confinés.
Connais-toi toi-même
Les acteurs des médias ont dû se montrer extrêmement réactifs pour offrir le bon contenu sur leurs plateformes et répondre aux attentes de leur public. Or, tous ne sont pas outillés pour être si flexibles. Pour réutiliser efficacement leurs archives par exemple, les médias doivent cataloguer et accéder facilement aux contenus « en stock » - et donc disposer à la fois de méta-données de contenu étendues et de systèmes efficaces de gestion des actifs médiatiques. L’automatisation de l’indexation du contenu devient ainsi un facteur clé d’efficacité.
Pour les interfaces de « replay » des chaînes de radios et TV traditionnelles comme pour les fournisseurs de services de vidéo à la demande en continu, il devient également critique de développer une plateforme de recommandation dotée d'intelligence artificielle et de machine learning. D'une part, la plateforme peut répertorier les contenus disponibles en fonction de leurs caractéristiques grâce à des algorithmes d'analyse sémantique. D'autre part, chaque utilisateur est profilé en fonction de ses comportements et de ses attitudes, afin d'identifier et de prévoir le contenu à recommander. Il ne s'agit pas seulement de répondre aux préférences des consommateurs, mais aussi d'augmenter l'appétit de consommer plus de contenu (et dans le cas de Netflix de nous culpabiliser ensuite).
Vers encore plus de personnalisation ?
Pendant le confinement, le besoin d'interaction a inspiré une créativité étonnante sur les plateformes de messagerie et les réseaux sociaux comme WhatsApp ou TikTok. Sur cette dernière application, téléchargée 65 millions de fois sur le seul mois de mars, des inconnus comme des célébrités rivalisaient d’inventivité pour faire rire ou danser leur audience. Une opportunité qui n’est pas passée inaperçue des producteurs de musique – citons l’exemple de Drake qui a d’abord publié la chorégraphie de sa nouvelle chanson Toosie Slide sur Tik Tok avant de lancer le single sur les autres plateformes, s’assurant le succès – ou des plateformes concurrentes – Instagram a d’ailleurs annoncé le lancement de la fonctionnalité Reels à la fin du mois de juin.
Cette tendance pourrait conduire à de nouveaux modèles de création et de consommation de contenu dans lesquels créateurs et diffuseurs pourraient être associés (TV traditionnelles, fournisseurs de services « OTT », médias sociaux, etc.). L'expérience du divertissement à domicile deviendrait plus sociale, et donc plus engageante pour les audiences et consommateurs. C’est ce qu’a réussi M6 en France avec le programme Tous en cuisine, dans lequel Cyril Lignac cuisinait des recettes publiées sur le site Cuisine AZ en même temps que des célébrités et des inconnus, tous les soirs jusqu’au 12 juin : l’audience créait le contenu en même temps que le média, avec le soutien d’une marque.
Il est dans l'ADN de l'industrie des médias et du divertissement d'être strictement connectés aux émotions des gens. Aujourd'hui, les avantages de cette connexion sont plus précieux que jamais pour s’adapter plus rapidement aux attentes, offrir davantage de personnalisation et inventer les succès de demain.