Les villes aux commandes de la mobilité du futur
Chronophage et polluante, la voiture n’a plus la cote dans les zones urbaines. Pour accélérer l’essor des mobilités alternatives, les villes ont un rôle majeur à jouer, notamment dans le domaine clé des données.
Chaque jour, les Français passent en moyenne 50 mn dans les transports pour se rendre à leur travail et en revenir1. Les transports sont également le principal secteur émetteur de CO2 avec 39 % des émissions totales et une étude récente évalue à 66,7 milliards d’euros le coût global de la pollution automobile pour l’année 2016 en Europe. Ces quelques chiffres justifient que la mobilité figure en tête des priorités des collectivités urbaines et de leurs habitants. L’objectif est clair : permettre aux personnes de se déplacer le plus librement possible en réduisant à la fois les temps de trajet, les coûts et les nuisances environnementales.
Dans les zones les plus denses, affectées par des bouchons perpétuels et de fréquents pics de pollution, la voiture individuelle n’est clairement pas une solution d’avenir. Pourtant, par commodité, absence d’alternative ou tout simplement par réflexe, elle demeure le moyen de transport privilégié des Français, puisque trois personnes sur quatre y recourent chaque jour pour se rendre à leur travail.
Stimuler l’essor des nouvelles mobilités
Pour faire évoluer les comportements, et diminuer le nombre de véhicules en circulation, les villes peuvent bien sûr étoffer l’offre de transports en commun, mais elles peuvent aussi favoriser l’essor des innombrables solutions de mobilité apparues ces dernières années : covoiturage, auto- ou vélopartage, VTC… Bien que ces services relèvent le plus souvent d’initiatives du secteur privé, les collectivités locales disposent en effet de nombreux leviers pour stimuler leur développement dans l’intérêt collectif.
Outre la création d’infrastructures spécifiques (pistes cyclables, voies réservées, parkings de délestage…), les villes peuvent orienter les usages vers ces nouvelles mobilités. Elles peuvent les intégrer à des approches multimodales (TER et autopartage en Alsace), créer des abonnements combinés (Pass Écomobilité à Toulouse), proposer des avantages incitatifs (service Bixi à Montréal) ou des programmes de fidélité (Fidélité TCL à Lyon). Et pour toucher la cible prioritaire que constituent les déplacements professionnels quotidiens, elles peuvent aussi accompagner les entreprises dans la mise en place de leur plan de mobilité, à l’instar de la métropole de Nantes.
Complexité et manque de visibilité
Toutefois, l’un des freins majeurs au développement des nouvelles mobilités reste la complexité et le manque de visibilité dus à une offre foisonnante. Des applications mobiles comme Citymapper ou Moovit y remédient en centralisant les informations relatives aux différents services et en déterminant les solutions possibles pour un trajet donné. Les villes n’ont pas nécessairement vocation à développer elles-mêmes de telles applications ; en revanche, elles ont un rôle déterminant à jouer pour leur permettre de voir le jour et d’être les plus pertinentes possibles.
Ces guichets uniques de la mobilité doivent avant tout relever un immense défi technique car il leur faut agréger les données des différents services (position des véhicules, disponibilité, tarifs…), y adjoindre d’autres informations utiles (météo, état du trafic, occupation des parkings, travaux et manifestations…) et des données propres à l’utilisateur (adepte ou non du vélo, titulaire ou non du permis de conduire… le tout conformément à la réglementation sur les données personnelles). Ce n’est qu’une fois en possession de tous ces éléments que le système pourra déterminer la meilleure solution de mobilité en fonction du trajet, du contexte et de la personne.
Faire évoluer les comportements
Destinés à s’orienter de façon commode et optimale dans le maquis des nouvelles mobilités, ces outils digitaux peuvent aussi jouer, sous l’impulsion des villes, un rôle déterminant pour faire évoluer les comportements. Leur adoption même, facilitée par une expérience utilisateur agréable, constitue déjà une première étape. Mais on peut aller plus loin en apportant des informations d’aide à la décision et de sensibilisation (temps gagné par rapport à la voiture, CO2 économisé…), introduire des incitations en récompensant les comportements citoyens (réduction sur les abonnements…), voire miser sur le ressort de la ludification (ou gamification).
La donnée, le nerf de la guerre
La Ville de Versailles mène actuellement des expérimentations avec l’institut de recherche Vedecom, dont fait partie Atos, qui abordent l’ensemble de ce questions : consolidation de l’offre de transport, plans de mobilité d’entreprise, interopérabilité et standardisation des plateformes, incitations à l’évolution des comportements…
« Mais quelles que soient les fonctionnalités mises en œuvre, toutes les solutions ont en commun de nécessiter de données riches et fiables. La donnée est le nerf de la guerre du développement des mobilités du futur. »
Plus les systèmes des différents opérateurs et de la smart city seront interopérables, plus il sera possible d’innover pour bâtir une intermodalité fluide, efficiente et écologique. La richesse des données permet aussi aux collectivités d’avoir une vision précise de la mobilité sur leur territoire, et donc, à l’aide d’outils analytiques avancés, de faire les meilleurs choix en termes d’infrastructures et de politique de transports. Dans cette perspective, les villes n’ont qu’un poids limité sur la nécessaire adoption de normes et de standards d’interopérabilité. En revanche, elles peuvent montrer l’exemple par une politique résolue et ambitieuse en matière d’open data. Pour preuve, c’est dans les villes le plus en pointe sur ce sujet, comme Paris ou Bordeaux, que les habitants peuvent goûter dès aujourd’hui aux possibilités de la mobilité de demain.
- Ministère des transports, 2015.
- Ademe, 2015.