Le secteur aérien carbure de plus en plus à l'IA
Alors que rien ne semble devoir freiner la croissance du trafic aérien, tout le secteur, depuis les constructeurs aéronautiques jusqu’aux opérateurs aéroportuaires, cherche à améliorer son efficacité pour y faire face. L’intelligence artificielle (IA) apparaît comme une voie privilégiée pour y parvenir sans pour autant transiger avec les exigences drastiques de sécurité du secteur.
En dépit – ou peut-être à cause – de l’emballement médiatique qui l’entoure, l’IA suscite encore de fréquentes réserves. La connotation futuriste du terme peut parfois donner l’impression d’une technologie expérimentale dont il faudrait attendre avec prudence qu’elle ait fait ses preuves tandis que beaucoup l’assimilent à tort à un système destiné à décider à la place des humains et en dehors de leur contrôle.
L’IA, une nouvelle forme d’aide à la décision
En réalité, l’IA n’est qu’une manière nouvelle d’extraire des informations de valeur de données brutes. Comme la Business Intelligence avant elle, c’est un outil qui aide à savoir et comprendre davantage pour décider mieux. Ses algorithmes existaient de longue date sur le papier ; ce n’est que la baisse du coût de stockage des données et l’accroissement des puissances de calcul qui a permis ces dernières années de passer de la théorie à la pratique. Pour apporter d’autres connaissances que statistiques, l’IA vise à traiter la donnée comme le ferait un cerveau humain. De même que celui-ci est capable de mémorisation, d’analogies, de déduction ou d’inférence, il existe plusieurs modèles d’IA : connexionniste, où des réseaux neuronaux permettent à la machine d’apprendre seule d’après une base d’exemples (machine learning) ; déterministe, où l’apprentissage se base sur des règles ; et symbolique, qui introduit des notions de raisonnements. Il est également possible de créer des IA hybrides, combinant ces divers modèles, par exemple en appliquant des règles sur des images reconnues grâce au machine learning. Un des enjeux majeurs pour l’avenir, et tout particulièrement pour le secteur aérien, est de parvenir à certifier les IA de manière à expliquer leurs décisions et démontrer leur fonctionnement. C’est d’ailleurs l’un des thèmes majeurs du futur institut interdisciplinaire dédié à l’IA, ANITI, à la construction duquel Atos participe à Toulouse.
La donnée, matière première de l’IA
Malgré ces recherches en cours qui permettront d’aller plus loin dans la nature, la qualité et la fiabilité des informations obtenues, les systèmes d’IA actuels apportent d’ores et déjà des connaissances précieuses. À condition toutefois de pouvoir s’appuyer sur des données riches et de qualité. C’est pourquoi toute démarche d’IA débute par la question de l’acquisition des données. Beaucoup attendent déjà dans les systèmes d’information d’être valorisées mais l’Internet des objets (IoT) permet d’enrichir ce corpus d’éléments directement captés sur le terrain : indicateurs de fonctionnement des machines, données environnementales, géolocalisation, photos, vidéos… La diversité-même de ces données est source de valeur car elle permet d’élargir l’analyse et parfois de déceler des corrélations inattendues. Une solution d’IA doit donc reposer sur une plateforme ouverte, capable d’intégrer une grande variété de sources, et sur un modèle équilibré entre la centralisation, qui permet des calculs massifs, et la décentralisation (Edge Computing), qui rapproche le traitement de l’action, réduit les flux de données et augmente la robustesse globale.
Des cas d’usages dans tous les domaines de l’aérien
Toutes les composantes du secteur aérien sont susceptibles de mettre dès aujourd’hui en place de tels systèmes et d’en tirer rapidement des bénéfices significatifs. Dès la conception des avions, l’IA peut aider les ingénieurs à optimiser le design et les inévitables arbitrages techniques (trade-offs). Par exemple, l’IA peut permettre d’explorer les conséquences d’une décision, aussi lointaines soient-elles, pour s’assurer que l’on fait le bon choix. Dans le domaine de la conformité, des chatbots nourris à l’IA peuvent aussi aider les ingénieurs à identifier les règles applicables et à retrouver les décisions passées.
Déjà largement optimisé, le processus de fabrication peut trouver dans l’IA de nouveaux gisements d’amélioration : aide aux inspections qualité grâce à l’analyse d’images, chatbots permettant aux opérateurs d’accéder aisément aux plans ou aux instructions dont ils ont besoin, identification d’inefficiences cachées dans les processus de production, l’agencement des ateliers ou l’organisation des tâches…
Activité clé pour la sécurité et la rentabilité du transport aérien, la maintenance des appareils peut elle aussi grandement bénéficier de l’IA, par exemple pour gérer par anticipation la localisation et les quantités des pièces de rechange. Concernant le pilotage, l’IA pourrait être d’une aide précieuse au commandant de bord au moment d’élaborer la route optimale en fonction de l’appareil, de sa charge, de la météo, etc.
Dans l’aéroport lui-même, l’IA sera présente partout, de la tour de contrôle, où elle pourra aider à mieux exploiter les airs et orchestrer les vols, aux contrôles de sécurité, où la reconnaissance faciale est déjà largement employée, et jusque dans les bureaux de l’administration, que ce soit pour améliorer les opérations (en analysant, par exemple, les mouvements de foule) ou pour améliorer l’expérience des passagers en leur proposant de nouveaux services personnalisés.
Par sa puissance incomparable et sa manière d’aborder les choses sous un angle inédit, l’IA excelle tout particulièrement dans les domaines dont la complexité dépasse les capacités humaines. C’est pourquoi, en raison des quantités de données qu’il génère, de l’imbrication étroite d’activités de toute nature et de ses très fortes contraintes de sécurité, l’aérien s’impose comme l’un de ses domaines d’application les plus prometteurs.