No code, low code, IA : quel avenir pour le métier de développeur ?
Le futur du code, c’est pas de code du tout ». Chris Wanstrath, le co-fondateur de GitHub, a prédit dès 2017 l’essor du no code et du low code. Ce sont aujourd’hui des tendances solides, que les startups, les PME ou les grandes entreprises n’hésitent plus à exploiter pour répondre à leurs besoins numériques. Plongée dans les possibilités et les inconvénients de ces plateformes, ainsi que leur impact sur le métier de développeur.
No code et low code, qu’est-ce que c’est ?
Une plateforme no code offre la possibilité de créer une application sans écrire la moindre ligne de code. Sur une plateforme low code, l’utilisateur peut éditer une partie du code source. Au début de l’Internet, les outils WYSIWYG (« what you see is what you get », ce que l’on voit est ce que l’on obtient) étaient déjà du low code sans en porter le nom. Au fil du temps ces outils se sont perfectionnés et démocratisés. Ils permettent à un large public de créer des sites web et des applications mobiles, de gérer des bases de données ou d’automatiser des tâches.
Nombreux sont les outils no codeet low code qui adoptent un business model «freemium». L’utilisation basique, à petite échelle ou temporaire est gratuite ; une utilisation plus poussée, à plus grande échelle ou après un certain laps de temps devient payante. Cette stratégie facilite grandement leur adoption. Le secteur est d’ailleurs en pleine croissance. D’après uneétude de Gartner de décembre 2022, le marché mondial des technologies de développement devrait atteindre 26,9 milliards de dollars en 2023, soit une augmentation de 19,6 % par rapport à 2022. D’ici 2025, 70 % des nouvelles applications développées par les entreprises utiliseront ces technologies, contre moins de 25 % en 2020.
Les applications no code et low code séduisent même dans les grandes entreprises, notamment pour la digitalisation de process métier précis.
Des technologies qui séduisent les grands groupes
Faute de temps et de moyens, le département IT n’est parfois pas en mesure d’absorber les nombreux projets d’applications des directions métiers. Soit ces dernières se résolvent à brider leurs ambitions numériques, ce qui n’est plus envisageable dans l’ère post-Covid ; soit elles pallient la pénurie de ressources IT en développant elles-mêmes des micro-applications qui répondent à leurs besoins précis. On parle de « citizen developers », ces équipes métier non-formées au dév, qui créent des programmes et des applications via le no code.
Elles ne contournent pas forcément la politique IT d’ailleurs. La Power Platform de Microsoft par exemple, jumelée à la suite Office 365, permet de créer des bases de données, d’automatiser des actions ou d’implémenter des modèles d’intelligence artificielle prédéfinis, pour reconnaître la langue d’un texte ou un objet dans une image. Pourtant, même si l’on peut utiliser les plateformes no code ans être développeur, il faut souvent une solide compréhension de l’ergonomie et de l’expérience utilisateur, ou certaines compétences en bases de données.
Côté métier, on apprécie la rapidité d’exécution et l’approche agile de ces outils pour tester de nouvelles façons de faire. Mais c’est aussi parfois le casse-tête des DSI. Tout le monde étant désormais en mesure de créer des systèmes, il est facile de perdre le contrôle. Le no code étant là pour rester, il est important de définir des politiques appropriées pour éviter qu'il ne devienne le nouveau «shadow IT ». Pour changer la donne durablement, les directions des SI et des métiers doivent s’entendre sur des processus appropriés d'intégration, de gouvernance, d'audit et de sécurité.
Le low code au service des développeurs
Les plateformes no code montrent leur limite lors de la création d'applications complexes nécessitant une architecture plus poussée, des assets réutilisables, une API bien définies et de l'interopérabilité. Le no code excelle en fin de compte dans les scénarios où le problème pourrait être résolu par une seule personne (ou une très petite équipe) à l'aide d'un seul système ou d'une seule application.
Le low code est une bonne réponse à des problématiques plus ambitieuses. En intégrant les plateformes low code à leur proposition de service, les équipes IT peuvent développer rapidement un POC (Proof of concept, ou maquette), afin de tester la réponse aux besoins métiers avant d’envisager des développements plus conséquents. Cela a un fort intérêt budgétaire bien sûr, mais permet aussi aux développeurs de se concentrer sur ce qui fait leur vraie valeur ajoutée.
Un outil low code correctement choisi et déployé peut transformer la productivité d’une équipe de développement, de moins de 1 000 lignes de code par développeur par mois à des millions de lignes par développeur par mois. Des prototypes simples peuvent être déployés en quelques heures, au lieu de plusieurs semaines.
Le métier de développeur demain
Les applications no et low code peuvent donc prendre le relais pour optimiser le temps des équipes IT. Mais cela veut-il dire qu’on n’aura bientôt plus besoin d’eux ? Non, ces plateformes ne sont d’ailleurs pas nouvelles dans l’histoire du développement logiciel. De nouveaux accélérateurs ont régulièrement vu le jour : outils RAD (Rapid Application Development), bibliothèques open source ou IDE (Integrated Development Environment) intelligents…
Gartner prédit que d'ici 2026, 80% des utilisateurs du low code seront des développeurs qui ne feront pas partie des départements IT, contre 60% en 2021. Si les programmeurs HTML, Java ou PHP, ou bien les experts sécurité, ont encore de beaux jours devant eux au sein des directions des SI, on va peut-être voir émerger des profils hybrides, entre technique et métier. Ceux-ci maîtriseront les plateformes no et low code, les bases de données, l’UX design, et pourront apporter de la flexibilité à la fois aux directions métier et aux directions informatique.
Le prochain développeur : l’IA ?
Depuis quelques années, on voit également arriver les co-développeurs, des systèmes alimentés par l'IA qui prennent en charge une partie du travail des développeurs. ChatGPT sait déjà écrire du code informatique, ce qui est tout aussi prometteur pour le développement d’applications, qu’inquiétant pour la vitesse de propagation de logiciels malveillants ou de rançongiciels.
La recherche actuelle dans ce domaine est très active, tant pour prendre en charge des cas d'utilisation plus complexes en optimisant les algorithmes, que pour permettre aux développeurs de mieux comprendre les résultats et mieux guider le système. Les outils de co-développement sont d’ailleurs destinés à renforcer les équipes IT, et non à donner à l'ensemble de l'organisation les moyens de créer entièrement des applications comme avec le no code.
Toutes ces plateformes et ces innovations peuvent donner la fausse impression de déstabiliser le travail des équipes IT. Mais ce nouvel écosystème entre IA, plateformes et experts, en réduisant les coûts et les délais, est le socle idéal pour accélérer la transformation numérique de nombreuses entreprises.
Publié le 26 janvier 2023